Origine de l’ostéopathie
Chappô : L’ostéopathe et le rebouteux cherchent à rendre leur place et leur mobilité naturelles à tous les tissus et organes des animaux, fussent-ils des humains.
La vie déplace, transforme et fait collaborer ses atomes à des tâches qu’aucun d’eux n’accomplirait seul. Ainsi, elle tente de s’adapter à son environnement et s’efforce de satisfaire ses besoins, voire ses envies. Chaque restriction de mobilité du vivant réduit donc son aptitude à réagir. Souvent sa résilience lui permet de guérir ses dysfonctionnements. Sinon toute cellule exposée à des conditions de vie trop défavorables a plus de risques de mourir, de se cancériser ou de favoriser des maladies, cf. article “L’ostéopathie, un outil diagnostic”.
Naissance de l’ostéopathie
La médecine “conventionnelle occidentale” traite surtout la chimie du vivant. L’ostéopathie tente, en outre, de lui rendre sa mobilité. Car la vie périclite sans les bonnes réactions chimiques, au bon endroit, au bon moment.
S’il est possible de trouver des traces des thérapies manuelles vieilles de plusieurs millénaires, le mot “osteopath” est créé en 1885 par Andrew Taylor Still (USA, 1828-1917). Son préfixe vient du grec “ὀστέον” ou ostéon qui veut dire os. Son suffixe path signifie soit le chemin en anglais, soit il est issu du grec “πάθος” ou páthos qui indique “la passion, l’émotion”. Selon son autobiographie et les écrits de ses élèves, dès son enfance, ce fondateur de l’ostéopathie suit son père Abram, pasteur méthodiste, qui soignait les amérindiens Shawnees. Il le voyait pratiquer de la petite chirurgie, ou les techniques des rebouteux (les bone-setters), pour les luxations d’épaule, les fractures…
Jeune, le gibier qu’il dépèce le familiarise avec l’anatomie. Á 10 ans, il souffre de maux de tête suite à une chute. Durant 20 ans il les soulage en balançant sa nuque posée sur une corde pendue à 20 cm du sol.
En 1845, il devient ingénieur. En 1851 il débute sa carrière de médecin-chirurgien itinérant et de fermier. De 1857 à 1860 il est élu du Kansas. Il s’engage de 1861 à 1864, avec l’armée nordiste, pour lutter contre l’esclavage. Lors de cette Guerre de Sécession, la pénurie de médecins diplômés et la formation médicale, qu’il a acquise avec son père, lui confèrent le statut de médecin et de chirurgien dans l’armée. Son impuissance à soulager ses semblables le fruste et, en opérant, il améliore ses connaissances en anatomie.
Démobilisé, il reprend ses activités agricoles et de médecin ambulant. Il se dit déçu de ces enseignements médicaux qui ignorent l’importance de la mobilité des articulations, et qui négligent les capacités du corps à se guérir seul. Il découvre que dans les régions les moins médicalisées, les enfants meurent moins de maladie. Même si certains contestent son diplôme de médecin, en 1893, la patente N°71 l’autorise à d’exercer comme “Physician” (médecin) et “Surgeon” (chirurgien) dans le Comté de Macon, dans le Missouri.
Le 29/09/1859, Andrew Taylor Still perd sa première femme et il reste seul avec 3 enfants.
Le 20/11/1860, il épouse en seconde noce Mary Turner, avec qui il aura 4 enfants. En 1865, il perd trois de ses enfants de méningite cérébro-spinale. Dès lors, le besoin de soigner plus efficacement l’obsède. Il étudie intensivement du corps humain, quitte à déterrer des cadavres. Il utilise un sac d’os pour démontrer sa vérité, et se tient informé des progrès des sciences, et de la médecine occidentale.
Á son époque, le microscope fait naître la microbiologie, la physiologie, l’anatomie pathologique… Schwan et Schleiden identifient et décrivent les cellules. Bichat prouve que les tissus sont constitués de cellules semblables. Grâce à la chimie et à la physique, Claude Bernard prouve l’importance des nerfs vasomoteurs et le rôle du foie et du pancréas pour maintenir la glycémie. Il différencie les glandes endocrines et exocrines. Bell démontre les fonctions motrices et sensorielles des nerfs rachidiens. Laennec met au point le stéthoscope. Bretonneau décrit la diphtérie, et Bayle la phtisie ou tuberculose. L’espace entre les cellules est enfin reconnu comme le milieu intérieur. Il oxygène, il nourrit toutes les cellules, et il élimine leurs déchets. Son homéostasie lui permet de conserver autour de valeurs optimales certains de ses paramètres comme la température, les taux d’oxygène, de CO2, de glucose, de micronutriments, de nombreuses autres molécules, etc.
Pourtant, pour lui, rien de cela n’explique l’amélioration instantanée et “quasi-magique” ressentie par tous quand il rend sa liberté de mouvement à une articulation. Médecin-chirurgien ambulant, il perfectionne son concept de l’ostéopathie. En 1874, il guérit la dysenterie d’un enfant, en relâchant les muscles de son dos, car il avait perçu le froid de leur ventre et le chaud de son dos. Cela le convainc que les restrictions de mobilité gênent localement le pouvoir “divin” d’auto-guérison de l’homme.
En 1874, Andrew Taylor Still présente ses recherches à l’Université de Baldwin au Kansas. Ses confrères le rejettent et le clergé considère ses succès comme diaboliques.
Vers 1870-1880, la loi réserve l’enseignement de la médecine aux universités. En novembre 1892, Andrew Taylor Still fonde donc la première école d’ostéopathie : l’American School of Osteopathy, à Kirksville. Ses premiers étudiants sont des scientifiques et des médecins, et ses enfants font partie des premiers diplômés.
En 1899, l’école compte 150 étudiants, et plus de 30 000 traitements ont été pratiqués dans le dispensaire rattaché à celle-ci. Sa réputation est grandissante et les gens viennent de loin pour s’y faire traiter. Andrew Taylor Still meurt à 89 ans, le 12 décembre 1917.
Docteur Bernard ROSA, médecine manuelle ostéopathie